Brittany Ferries : l'accord sur le temps de travail ratifié

Alors qu'en fin d'année dernière, les syndicats de Brittany Ferries contestaient la signature d'un nouvel accord sur le temps de travail devant entrer en vigueur le 1er janvier 2016 ; celui-ci vient juste d'être ratifié par ces mêmes syndicats. Retour sur les événements ayant permis la signature de cet accord.

Le rejet du projet de la direction

Le HSC Normandie Express le 02 novembre 2014 à Saint-Malo.
Le HSC Normandie Express sous pavillon britannique ?

Le 17 avril 2015, la direction de Brittany Ferries convoque un comité d'entreprise extraordinaire afin de proposer un nouvel accord sur le temps de travail des officiers de ses navires.

Cet accord prévoyait alors de mettre fin à l'annualisation du temps de travail, devenant pluri-hebdomadaire sur 4 semaines. Cela impliquait de fait de mettre un terme au sacro-saint 7 jours en mer ; 7 jours à terre ; de fait remplacé par une nouvelle routine 3 ou 4 jours en mer, puis autant à terre. Cet accord prévoyait également que les officiers travailleraient 30 minutes de plus quotidiennement.

Les Syndicats CGT et CFDT et le Comité d'Entreprise de Brittany Ferries se mirent alors vent debout contre cette nouvelle organisation du temps de travail, jugée dangereuse pour la santé des salariés de la compagnie. Elle devait également entraîner une plus grande fatigue chez les personnels selon les détracteurs du projet.

De fait, CGT et CFDT refusèrent de signer l'accord, qui entra malgré tout en vigueur le 1er janvier 2016. En effet, la direction de Brittany Ferries souhaitait mettre fin aux accords transitoires mis en œuvre en 2012 afin de revenir à la compétitivité, objectif atteint. Il s'agissait ainsi de revenir au plus vite sur une organisation viable sur le Long Terme, ce que vise à permettre ce plan.

Par ailleurs, la mise en œuvre unilatérale de ce plan entraînant un important surcoût par rapport à ce qui était escompté par la compagnie, la direction fit part de son intention de ré-immatriculer le HSC Normandie Express en Grande-Bretagne, pavillon 20% moins onéreux que le pavillon français. Mais la direction faisait alors part de sa conscience que "cette décision aura des conséquences en matière de promotions pour les navigants et en matière d'emploi pour les saisonniers".

Enfin, le 29 décembre 2015, le Comité d'Entreprise fit part de son intention de porter plainte contre la compagnie, jugeant que le délais de préavis de la direction sur la mise en place de cette nouvelle organisation. Il choisit la procédure du référé, faisant peser sur la compagnie le risque immédiat du blocage à quai de ses navires en raison de l'invalidation par la justice de cet accord sur le temps de travail.

La naissance du collectif Ensemble pour notre Avenir

Le commandant Jean-Pascal Richard, en négociations avec le représentant de la CGT.
Le commandant Jean-Pascal Richard, en négociations avec le représentant de la CGT. Photo : Ouest France.

Face aux risques que faisait peser cette position des Syndicats sur l'Avenir de la compagnie, le Second-Commandant du M/V Normandie, M. Jean-Pascal Richard, par ailleurs syndiqué à la CFDT, décida de monter le collectif Ensemble pour notre avenir.

Le mouvement, crée début-janvier 2016, parvint à réunir 1,000 signatures sur une pétition s'exprimant en faveur de la signature de l'accord qu'il lança en moins de 2 jours d'existence. Fort de ce succès, le leader de ce mouvement, M. Jean-Pascal Richard pouvait contester les résultats d'une première consultation organisée par les syndicats sur cet accord, jugée "Non-Démocratique". En effet, les votes ne s'étaient pas fait à bulletin secret, entraînant une très forte pression sociale sur ceux qui osaient dire Oui à l'accord en présence des syndicalistes. Il s'agissait dés lors pour M.Jean-Pascal Richard et plus largement le mouvement dont il est le leader, de ne "pas laisser un juge décider de notre avenir".

Des rencontres eurent par la suite lieu avec les syndicalistes CGT (à Brest) et CFDT (au Havre) afin de leur demander de signer l'accord à la suite d'une nouvelle consultation organisée à bulletin secrets. Si Paul Golain, secrétaire général du syndicat maritime Normandie CFDT s'engagea à signer l'accord en cas d'un oui majoritaire lors de cette consultation, les échanges furent beaucoup plus mouvementés avec la CGT, qui ne vit pas d'un bon œil la formation d'un collectif de salarié qu'elle est censée représenter contre elle-même.

Finalement, la consultation se tint, et les résultats publiés mi-février 2016 firent part d'un oui massif : 80% des salariés concernés par cet accord approuvèrent en effet le oui. Les syndicats avaient entre temps retiré leur plainte auprès du tribunal administratif, donnant à Brittany Ferries l'assurance de pouvoir renaviguer sur des eaux moins troubles. Le re-pavillonnement du HSC Normandie Express fut conformément aux engagements de la Direction en cas de signature de l'accord, annulé.

 

Ainsi, les syndicats de Brittany Ferries perdirent leur combat face aux salariés réunis dans le collectif Ensemble pour notre avenir emmené par le commandant Jean-Pascal Richard.

Sources

"Brittany Ferries : des salariés se mobilisent contre leurs délégués syndicaux". Le Marin, 05/01/2016 (mis à jour le 06/01/2016). Disponible sur www.lemarin.fr.

"Une action en justice contre la direction de Brittany Ferries". Le Marin, 30/12/2015. Disponible sur www.lemarin.fr.

"Brittany Ferries : la direction veut revoir le temps de travail". Le Marin, 17/04/2015. Disponible sur www.lemarin.fr.